mars-avril 2011

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Édito : Ma ville demain
Une ville tout entière se projette collectivement dans l’avenir. Un exercice poétique, risqué et intéressant…
Le temps n’existe pas : le futur n’est pas encore, le passé n’est plus, le présent vous fuit entre les doigts. C’est saint Augustin qui l’a lumineusement montré dans les Confessions. Une lecture à recommander à ceux qui ont mandat ou métier de construire la Cité. En fait, Augustin savait bien, comme tout le monde, que le temps, mais si, existe. Mais son appréhension par les hommes se fait sur le mode de la mémoire qui rend présent un passé évanoui et sur le mode du projet, de l’espoir, de la crainte qui font advenir un futur encore incertain. Et bien fou serait celui qui voudrait bâtir une politique sur l’écume de l’instant.
Ce n’est pas parce que Nantes serait « folle de philo » que nous ouvrons ce numéro par ces quelques considérations sur le temps qui passe. Mais parce que l’agglomération s’est lancée dans un projet ambitieux : tenter de dessiner collectivement le visage que prendra la métropole en 2030. Vingt ans : une paille dans la vie des villes, un bail dans la vie des hommes.
Ce dossier débute par un entretien avec Jean-Marc Ayrault, qui aura 80 ans en 2030. Il nous livre sa vision de Ma vi(ll)e demain, puisque c’est ainsi que s’intitule la démarche engagée. Pas question de prétendre lire dans une boule de cristal : par définition, nous ne pouvons prévoir que le prévisible. Il s’agit d’abord « de redonner du souffle au projet nantais ». En manquerait-il ? « Non, mais… », répond le président de Nantes Métropole qui atteint un moment de son existence où l’on peut légitimement s’interroger sur la trace qu’on laissera.
Les lycéens, eux, n’ont pas encore ces soucis, mais sont, à coup sûr, les premiers concernés. Un professeur d’histoire du lycée Nicolas-Appert, à Orvault, a fait travailler les élèves de deux classes de Première sur la manière dont ils voient leur ville demain. Cauchemars et rêves heureux se mêlent dans ces projections que nous avons regroupées par mots-clés de Aéroport à Voiture en passant par Climat, Loire ou Tramway.
Place aux experts ensuite. Huit géographes, urbanistes, sociologues, politistes, philosophes ont accepté d’esquisser des scénarios. Ces experts ont en commun de ne pas résider à Nantes, mais de bien connaître la ville à des titres divers. Chacun a répondu à sa façon : du sage exposé à la fiction débridée. Gardez précieusement ce numéro. Rendez-vous dans vingt ans pour vérifier si le tramway conduira bien jusqu’à la mer, si l’Erdre coulera à nouveau à l’air libre, si des légumes bio pousseront sur l’Île de Nantes, si le TGV arrivera quai des Antilles, si Nantes sera toujours « cette fourmillante cité pleine de rêves »… Le crayon de Nicolas de La Casinière donne dès aujourd’hui une forme d’existence aux rêveries des experts.
Une série d’entretiens permet de mieux comprendre les tenants et aboutissants de la démarche en cours et d’expériences comparables dans d’autres villes françaises. Thierry Violland, le directeur de l’Agence d’urbanisme, est le pilote opérationnel de Ma vi(ll)e demain. Il montre à la fois que 2030 est très proche, mais que rien n’est écrit, en réfléchissant sur quatre grands thèmes : la démographie, l’emploi, les relations avec les autres territoires, le lien social.

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